📆 25/09/2024
ISDR-BUKAVU
Cette conférence conjointe entre artistes et scientifiques s’articulera autour de 3 panels, avec An Ansoms & Emery Mudinga comme Key note speakers.
Le premier portera sur « l’écologie politique des luttes paysannes pour l’accès aux ressources naturelles dans la région des Grands Lacs d’Afrique »; le deuxième abordera « l’écologie politique de la gouvernance des crises sécuritaires à l’est de la RDC », et le troisième traitera de la « production des savoirs et création artistique en temps de crise ».
Cette rencontre s’inscrit dans le cadre du Projet de Recherche pour le Développement (PRD) ResourceRush – Acteurs ‘périphérisés’ et luttes d’accès aux ressources naturelles en RDC : Vulnérabilités et résiliences. Un projet mis en œuvre grâce au partenariat entre l’ Université catholique de Louvain (UCLouvain), l’UMONS (UMons) en Belgique, et l’Institut Supérieur de Développement Rural de Bukavu (ISDR-Bukavu) en RDC, avec le soutien financier de l’Académie de recherche et d’enseignement supérieur – ARES.
Panel 1 : Faire face aux crises écologiques ou à la ruée vers les ressources naturelles : écologie politique des luttes paysannes pour l’accès aux ressources naturelles dans la région des Grands Lacs d’Afrique
➡ Vedaste CITULI ALINIRHU : Création des Aires protégées dans des zones à conflits armés : Manifestation de rapport de force et conflits ethniques dans le territoire de Fizi au Sud-Kivu
➡ Lionel BISIMWA MATABARO : Trajectoires croisées de parcs nationaux de Kahuzi Biega et de la Lomami en RDC : injustice et résistances locales
💡 Emery Mudinga: Discutant/Président
Panel 2 : Faire face aux crises écologiques ou à la ruée vers les ressources naturelles : écologie politique de la gouvernance des crises sécuritaire à l’est du Congo.
➡ Nicole Matabaro : Crises foncières et développement local : Terres paysannes, crises identitaires et réponses des acteurs dans les hauts plateaux de Kalehe, RDC.
➡ Christian Mudinga : La crise sécuritaire sous « Etat de siège » : Au-delà de la surmilitarisation, comprendre la persistance de l’insécurité et de la criminalité dans la ville de Goma.
💡 An Ansoms: Discutante/Présidente
Panel 3. Faire face aux crises écologiques ou à la ruée vers les ressources naturelles : Production des savoirs et création artistique en temps de crise.
➡ Dr Patch Cowb London ; JMB Beaugoss ; Mérou Mégaphone ; Rachel Zalungura. Entretien (Show case) faire face aux crises et la création artistique à l’est de la RDC.
💡 Emery Mudinga: Discutant/Président
An Ansoms : Session de clôture « Faire face aux crises écologiques ou à la ruée vers les ressources naturelles (discussion théorique). »
Résumés des présentations
1. Crises foncières et développement local à l’est de la RDC : Terres paysannes, crises identitaires et réponses des acteurs dans les hauts plateaux de Kalehe, RDC
Nampondo Matabaro, Okonkwa Kafunga, Omega Thige Fréderic, Alimulume Mutabesha, Patient Polepole, Emery Mudinga
Résumé
La littérature récente sur les conflits violents et la crise foncière, en tant que moteur de violence à la fois individuelle et collective, résultant de la compétition pour l’accès et le contrôle des ressources naturelles ainsi que des questions de pouvoir et d’identité, a pris une importance considérable dans l’Est de la République Démocratique du Congo (RDC). Le foncier y est perçu comme le réceptacle des relations conflictuelles, de la violence armée et de la fragilité de la cohésion sociale, phénomènes qui dominent cette région depuis les deux dernières décennies. Ainsi, le foncier est associé à l’identité culturelle, génèrerait un certain ethnocentrisme totalitaire, réfutant la légitimité de toute altérité. Des études récentes ont établi des liens entre la compétition foncière, l’émergence des conflits armés, l’insécurité alimentaire, la lutte pour le contrôle du pouvoir coutumier et la fragmentation sociale. Cette dynamique a été exacerbée par le pluralisme juridique, les revendications territoriales et identitaires de plus en plus complexes, ainsi que l’interventionnisme des acteurs étatiques et non-étatiques dans la sécurisation des droits fonciers en milieu rural. Plusieurs recherches ont été menées sur les conflits fonciers à Kalehe, mais peu ont exploré la conceptualisation du foncier au-delà du prisme réducteur d’« arme de guerre ». Par une approche qualitative, cette étude se propose d’aller au-delà de l’analyse conjoncturelle centrée sur le paradigme conflictuel pour adopter une approche structurelle. Elle postule que les conflits fonciers à Kalehe découlent principalement du détournement des terres et non des identités culturelles elles-mêmes. L’étude a cherché à comprendre : (1) dans quelle mesure les conflits fonciers affectent les modes de vie des communautés locales, et (2) quelles sont les solutions matérielles et institutionnelles actuelles ou envisageables, susceptibles de transformer le foncier en un outil de paix et de développement local, plutôt qu’en une arme de guerre, dans les milieux paysans.
Mots clés : Terres paysannes ; Crises foncières, développement local, RDC
2. Repenser la gouvernementalité à partir de trajectoires croisées de parcs nationaux de Kahuzi Biega et de la Lomami en RD Congo
Bisimwa Matabaro Lionel,
Abstract
Cette présentation ne porte pas sur une étude comparative du Parc National de la Kahuzi-Biega (PNKB) et du Parc National de la Lomami (PNL). En effet, nous reconnaissons que la situation géographique, le contexte historique, politique et institutionnel, ainsi que les considérations socioculturelles dans lesquels chacun des deux parcs a émergé et continue de se développer lui sont propres. En outre, elle s’inscrit dans la logique de recherches multi-situées dans le temps et dans l’espace, dont l’objectif consiste à croiser les deux trajectoires de ces parcs, sous-examen, à partir du concept de gouvernementalité, tel qu’il a été développé par Michel Foucault. Le cadre théorique qui croise la gouvernementalité et la conservation de la nature permet d’examiner la manière dont les politiques de conservation, qui vont au-delà de simples techniques de gestion de la biodiversité, s’inscrivent dans une logique de pouvoir, de production de discours et de savoirs par l’État, les ONG internationales et nationales et les entreprises privées, en vue de réguler la vie de populations riveraines et de le transformer en sujets dociles et s’autocontrôlés. La démarche ethnographique a facilité la collecte de données auprès des populations riveraines, y compris les peuples autochtones résidant dans quelques villages riverains aux parcs susmentionnés. Les informations recueillis ont été confronté, à travers la logique de triangulation des acteurs et de sources. Il ressort que les trajectoires de ces deux parcs, sous-examen, se croisent non seulement, à travers la manifestation de logiques de pouvoir (colonial et néocolonial) et la présence de dispositifs règlementaires, éducatifs, punitifs et incitatifs mis en place pour favoriser la docilité et le contrôle de riverains, mais aussi, elles illustrent la capacité de ces populations riveraines à développer, individuellement ou collectivement, les stratégies de contournement, d’improvisation, de résistance et de contraignant parfois les acteurs puissants (l’Etat, les ONG internationales et les bailleurs de fonds) à dialoguer, à négocier et à ajuster certains dispositifs de conservation. Penser la conservation comme une gouvernementalité à partir de la seule matrice de pouvoir et de technologies de contrôle et de docilisation de riverains devient réductreur et incomplet, dans certain contexte, si, on ne tient pas compte de capacités d’improvisation, de résistance, de contournement dont dispose certains riverains de parcs nationaux.
3. La crise sécuritaire sous « l’Etat de siège » : Au-delà de la surmilitatisation, comprendre la persistance de l’insécurité et de la criminalité dans la ville de Goma, RDC
Christian MUDINGA, Jean-Louis NZWEVE, Patient POLEPOLE, Jean-Paul BYAMUNGU
Abstract
Afin de lutter contre les groupes armés en RDC, l’état de siège a été instauré le 6 mai 2021 dans les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri, en raison de la détérioration de la situation sécuritaire dans la région. La surmilitarisation a été ensuite une des stratégies en appui de l’Etat de siège, d’où la présence des troupes militaires de FARDC en appui par l’EAC, la SADEC, la MONUSCO ainsi que les groupes armés locaux sous la coalition «Wazalendo ». Malgré cela, la ville de Goma qui nous intéresse dans cette étude, située dans la province du Nord-Kivu, continue à être confrontée à une insécurité croissante, caractérisée par des vols, des assassinats ciblés, des kidnappings par des personnes non identifiées. Plusieurs facteurs sont responsables mais il faut dire que la surmilitarisation est souvent citée comme l’une des causes principales. Goma, bien que considéré comme un refuge pour les habitants des zones rurales affectées par les conflits armés, a acquis la réputation d’être l’une des villes les plus dangereuses de la RDC au cours de trois dernières décennies. Les causes de cette insécurité évoluent, souvent liées à l’instabilité politique, à la crise économique et à l’activité des groupes armés dans les zones rurales environnantes (Hendricks & Buscher, 2019). Ce contexte soulève des interrogations sur la gouvernance militaire tout en considérant qu’il ne s’agit pas d’une première fois la présence des troupes militaires locales et étrangères qui date l’expérience de l’AFDL et RCD (Kabaka, 2016 ; Vlassenroot, 2003 ; Bucyalimwe, 2003 ; Mbelo, 2003). D’où, il sera question dans cet article de comprendre comment la surmilitarisation affect-elle l’insécurité urbaine et la criminalité dans un contexte de l’Etat de siège déclaré depuis 2021 au Nord-Kivu ? Et comment les acteurs locaux, en fonction de leur positionnalité définissent et perçoivent-ils l’insécurité persistante dans la ville de Goma ? Pour répondre à ce questionnement, l’étude s’inscrit dans une approche qualitative.
Création des Aires protégées dans des zones à conflits armés : Manifestation de rapport de force et conflits ethniques dans le territoire de Fizi au Sud-Kivu
Vedaste Cituli
La présentation explorera la politique de création de zones protégées dans des régions caractérisées par des conflits armés. La littérature existante se concentre souvent sur la façon dont la conservation peut être un outil de contre-insurrection par l’État dans des « environnements violents » – comme un outil pour contrôler certaines populations et « la jungle ». Cependant, nous explorons un autre type de cas, où différents groupes ethniques, en conflit les uns avec les autres, utilisent la création de zones protégées comme une modalité de conflit interethnique. Nous avons étudié ces processus dans la réserve de faune de Ngandja à Fizi, dans le Sud-Kivu, à l’est de la RDC. Dans cette réserve, les acteurs internationaux impliqués dans leur création ont été entraînés dans ce conflit interethnique – qui comprend des liens étroits avec des élites politiques et économiques puissantes. En raison de leur approche descendante, ils ont ignoré les motivations locales à l’origine de leur création. Cette présentation montera comment la décision de classer les forêts communautaires comme zones protégées peut être utilisée comme stratégie pour déplacer des communautés jugées allochtones, de manifestation de pouvoir de certains dirigeants locaux et comment la conservation peut prolonger le conflit armé. Elle est basée sur un travail de terrain ethnographique réalisé en 2017, 2022-2023.